"Une blockchain au service de la culture" par Denis Février, co-fondateur de Scènso.tv

En quoi la blockchain permet la diffusion et la valorisation du spectacle vivant ?

 

 

La diffusion de contenus a connu, si ce n’est une révolution, tout au moins une modification marquée de ses modes de distribution sur ces dernières années. Ceci est particulièrement vérifié avec la sVOD OTT, ou vidéos à la demande sur abonnement en accès direct (1). Netflix est clairement passé par ici et la démocratisation d’un modèle économique, défriché par ailleurs par de nombreux acteurs, a certainement des leçons à nous apporter pour ce qui participe de l’accès à la culture. Enfin, les dernières évolutions des modalités de développement de plate-formes internet, notamment avec l’apparition de la JAMStack, apportent aussi leur lot de considérations excitantes pour tout acteur du secteur. Mais point trop n’en faut, cela fera sans doute l’objet d’un prochain article !

 

"Il s’agit de garantir une rémunération juste, sécurisée et transparente des différents ayants-droit."

 

Toutefois, une inconnue demeure : l’évolution des modes de consommation permet-elle de suivre précisément le cycle de vie économique d’une oeuvre ?

Il est désormais possible de mettre en place des solutions technologiques, permettant la mise en oeuvre d’un chemin de d’audit clair et certifié, sans devoir sacrifier à chaque échéance au chemin de Canossa des réconciliations plus ou moins pertinentes, ou devoir se contenter de données approchées. Il s’agit de garantir une rémunération juste, sécurisée et transparente des différents ayants-droit.

Par ailleurs, et au-delà des peut-être prosaïques perspectives de monétisation, cela interroge également le suivi et l’authentification d’oeuvres artistiques, mais aussi :

- faciliter la démocratisation de la diffusion - l’accès à la culture pour toutes et tous, y compris et surtout pour des publics éloignés pour des raisons sociales, géographiques ou économiques.

- permettre un accès à la diffusion pour des artistes, eux-mêmes éloignés des canaux habituels, du fait de limites finalement assez similaires et bien souvent liés à une assise financière insuffisante.

 

L’hypothèse est donc la suivante : il en va de la survie et l’indépendance du marché européen que de savoir favoriser l’émergence de canaux permettant d’accroître et de stabiliser la distribution de revenus à l’ensemble des parties prenantes de la chaîne de valeur.

- La mise en avant des contenus dans la marée opaque des contenus vidéos disponibles sur internet sera notamment permise par la mise en place d’une éditorialisation prescriptive pertinente, ainsi que de solutions d’accès libres favorisant l’accessibilité.

- Ceci sera également l’occasion de contribuer à consolider les revenus des artistes, par la mise en ligne d’une solution légale intégrée, véritable alternative au piratage.

 

"Il ne s’agit pas de rechercher ici une désintermédiation des acteurs existants, mais bien de permettre leur transformation numérique, en armant la disruption du droit d’auteur par l’implémentation d’une blockchain dédiée."

 

L’existence de ces nouveaux canaux ne sera consolidée que si la complexité de la gestion des droits d’auteurs est adressée de manière à permettre une lecture directe, distribuée, certifiée et transparente des droits calculés. Il ne s’agit pas de rechercher ici une désintermédiation des acteurs existants, mais bien de permettre leur transformation numérique, en armant la disruption du droit d’auteur par l’implémentation d’une blockchain dédiée. Les caractéristiques de cette blockchain sont prescrites par les spécificités contractuelles du monde du spectacle vivant et permettent de lier le chiffre d’affaires (les abonnements des plateformes sVOD, en l’occurence) et les droits dérivés du comportement de consommation (ce que l’abonné.e consomme détermine quels spectacles sont rémunérés et dans quelle proportion). C’est apporter de la précision au service des auteurs, des autrices et des ayants-droit.

 

Le constat sur la structure économique de la diffusion vidéo du spectacle vivant est la suivante :

- une grande dispersion d’acteurs et des catalogues indépendants confrontés à des canaux de distribution puissants,

- un modèle économique reposant sur un pré-financement amont ainsi que la mise en place de minima garantis pour réduire le risque inhérent à la diffusion de spectacles,

- une incapacité à relier clairement des données de consommation aux revenus générés pour le diffuseur,

- un marché à un tournant technologique, tant sur les modèles économiques émergents en terme de diffusion, que sur les évolution des solutions de captations (HD, 4K, 360, son binaural…),

- une forte complexité de la gestion du droit d’auteur (ventilation entre de multiples acteurs aux droits concurrents et/ou concomitants, en terme de régionalisation, temporalité…),

- un contrat de production audiovisuelle qui prévoit la répartition des droits d’auteur entre les différentes parties prenantes, selon des critères de temporalité et de géolocalisation précis.

 

Les protocoles de la blockchain proposent des solutions fascinantes au défi de la diffusion et de la valorisation du spectacle vivant :

- Un enregistrement en temps réel effectué dans un registre qui propose un inventaire fiable et vérifiable de chacune des transactions - pas de doubles dépenses, fraudes, abus de confiance ou modification intempestive des transactions,

- Une série de preuves cryptographiques permettant de délocaliser la relation de confiance,

- Un registre distribué et public générant des preuves informatiques, garanties de l’ordre chronologique et du contenu des transactions enregistrées,

- Le recours à des fonctions (hash, cryptographies…) sécurisant le réseau d’information et rendant le registre quasiment inviolable une fois établi,

- Les Smarts Contracts, véritables protocoles informatiques qui facilitent, valident et exécutent des critères contractuels pré-établis, sans déviation ni interprétation subjective.

 

Il s’agit donc d’une technologie temps-réel d’exécution automatique de protocoles et d’archivage de données, que nous pouvons établir en fonction des spécificités de l’industrie concernée - ici, la diffusion de captations de spectacle vivant. Parce qu’elle repose sur des preuves cryptographiques, elle encourage la collaboration entre les différentes parties prenantes de la chaîne de valeur, favorisant la transparence quant à ce qui détermine le chiffre d’affaires, alors que les abonné.es auront la certitude que leur abonnement rémunère effectivement les artistes qu’elles/ils apprécient (ce qui est loin d’être le cas avec le modèle actuel…). De plus, cette technologie permet de mettre en oeuvre une solution de reddition de compte directe, rémunérant correctement l’ensemble des intéressé.es, tout en proposant des données qualifiées quant aux comportements d’achat et à la façon dont cette reddition a été construite.

 

Cette solution existe, elle en est à ses premiers balbutiements - chez Polkatulk, nous démontrons que nous pouvons :

- rémunérer les ayants-droit en temps réel et favoriser un partage équitable de la chaîne de valeur, reposant sur une totale transparence des transactions,

- mettre en place une chaîne contractuelle évolutive et infalsifiable, incluant un outil de reddition de comptes par partie prenante, avec des accès sécurisés dédiés permettant le contrôle, l’animation et la simulation,

- produire des datas et permettre l’analyse de cibles sur la base de données anonymisées.

 

Scènso.tv et son architecture micro-services participe à la création d’un marché légitime et auditable et repose sur une distribution en ligne responsable d’oeuvres audiovisuelles, tout en allouant correctement les droits inhérents à cette diffusion dans une blockchain privée dédiée.

 

En intégrant l’ensemble des éléments contractuels des œuvres en amont, nous favorisons la sécurité et la transparence des transactions entre les différentes parties prenantes de la diffusion d’une œuvre culturelle. Les clauses, ainsi codées, s’exécutent automatiquement dans le cadre d’un livre de comptes infalsifiable, liant chiffre d’affaires généré et calcul des droits dûs.

 

Polkatulk et Scènso.tv vont également permettre l’accès au marché de produits culturels aujourd’hui non diffusés, en proposant des revenus récurrents, directement traçables à des offres d’abonnement. Ceci favorise également une meilleure élasticité dans le financement des œuvres faisant l’objet de captations, en permettant une plus grande audace dans le choix des spectacles. La première instanciation de nos choix technologiques est en ligne sur www.scenso.tv

 

(1) selon notamment l’étude de l’Observatoire Européen de l’Audiovisuel, la croissance des plateformes sVOD est de l’ordre de 128% p.a. entre 2011 et 2016, et cette croissance se fait au détriment de la distribution tant physique qu’en VOD.

 

 

 

Parole d'expert proposée par

Denis Février, co-fondateur de Scènso.tv